Le présent rapport est la deuxième édition du profil migratoire du Sénégal après celle de 2009. Les informations contenues dans ce document sont produites par les services habilités. Le rapport a été réalisé par un consultant sous la supervision de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie et de l’Organisation Internationale pour les Migrations. L’élaboration du profil migratoire du Sénégal 2018 prend place dans le cadre du projet « Soutien à la liberté de circulation des personnes et migration en Afrique de l’ouest » qui est cofinancé par l’Union Européenne et la CEDEAO et mis en œuvre par l’OIM, l’OIT et l’ICMPD. Il s’inscrit dans le cadre d’un partenariat entre l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM)…

Au Sénégal, l’ensemble des analyses consacrées aux migrations soulignent la difficulté majeure liée aux lacunes dans la collecte et la production de données migratoires permettant de d’appréhender correctement la réalité migratoire. Les données disponibles sont parcellaires et n’offrent pas de possibilités d’analyse à la fois complète, fine et détaillée. Compte tenu de ces insuffisances, il est difficile d’observer l’évolution du phénomène migratoire dans le temps et dans l’espace. Ceci est d’autant plus vraisemblable qu’avec la complexité grandissante de la migration, le Sénégal apparaît comme un pays à la fois de départ, de transit et de destination.
A défaut d’une mesure exacte, il est possible d’avoir une idée de l’ampleur du phénomène et de son évolution, en se basant sur les sources existantes. Celles-ci permettent de dégager les tendances
principales des dynamiques migratoires et de fournir ainsi une « représentation » du phénomène, tant dans les changements qui s’opèrent dans les directions que dans les origines des flux.
Immigration internationale
Le Sénégal est un pays d’accueil traditionnel de populations d’origines diverses. Cette immigration reste dominée par les pays limitrophes et notamment la Guinée (43%), le Mali (10%), la Gambie (7%) et la Guinée-Bissau (6%).
Ces quatre pays représentent 66% de la population étrangère établie au Sénégal. A cet égard, la Mauritanie, autre pays limitrophe, se distingue par l’importance de ses ressortissants parmi les réfugiés au Sénégal (94% des effectifs) selon les données fournies par le HCR.
La répartition de ces immigrés internationaux par rapport à leurs régions d’établissement au Sénégal montre une forte concentration à Dakar (57%). Quelle que soit la nationalité, la région de Dakar accueille l’essentiel des immigrés établis au Sénégal ; les autres régions d’accueil les plus importantes étant Ziguinchor (6,7%) et Kolda (6,1%).
Dans l’ensemble, la population résidente étrangère apparaît ancienne et tout au moins stable, sinon légèrement en baisse depuis le milieu des années 1970. La stabilité politique et économique du pays contribue à en faire une destination privilégiée en Afrique de l’Ouest.
Emigration internationale
L’émigration internationale se caractérise principalement par des flux sus-sud essentiellement dirigés vers les pays de la sous-région ouest-africaine, et des flux sud-nord orientés vers les pays industrialisés de l’Europe et de l’Amérique du Nord. Le premier champ migratoire s’est élargi vers certains pays de l’Afrique centrale et de l’Afrique du Sud, caractérisant des courants migratoires extra-régionaux essentiellement captés par le Gabon, le Congo et la République d’Afrique du Sud. De même, dans l’autre sens, les déplacements de population lointains furent longtemps monopolisés par la France. Aujourd’hui, de nouveaux pays de destination sont apparus, traduisant ainsi une réorientation des flux, voire même une recomposition à l’intérieur du champ d’émigration nord. / 4 ANSD, RGPHAE, 2013

Avec une superficie de 0,3% seulement de celle du pays, la région de Dakar concentre près du quart de la population sénégalaise (23,2%) selon les données du RGPHAE de 2013.
Cette polarisation de Dakar a conduit à une forte pression foncière dans la capitale, induisant en même temps une urbanisation non contrôlée, qui s’est traduite par l’occupation de zones inondables et la prolifération de l’habitat spontané
Fondamentalement, les dynamiques migratoires internes se manifestent sous la forme de l’exode rural. La tendance forte renvoie à une concentration de la population dans la partie ouest du pays dont l’urbanisation augmente rapidement. Le déséquilibre dans la répartition territoriale des activités économiques a engendré la macrocéphalie de la région de Dakar au détriment des régions de l’intérieur.
Présence croissante des femmes dans les flux migratoires
Les dynamiques de migration interne et internationale au Sénégal sont marquées par une participation accrue des femmes. Au niveau interne, la propension à émigrer ne présente pas de différence significative par rapport au sexe selon les données du recensement de 2013. Mais on note une tendance plus importante des jeunes filles à migrer par rapport aux jeunes garçons, notamment dans les tranches d’âge comprises entre 15 et 29 ans. Le pourcentage de migrantes internes parmi les femmes est de 9,6% contre 8,2% chez les hommes dans la tranche d’âge 15-19 ans. Ce ratio est de 11,6% contre 10,1% dans la tranche d’âge 20-24 ans et de 12% contre 11,3% dans la tranche d’âge 25-29 ans.
Au niveau international, les femmes représentent 16% des migrants sénégalais partis à l’étranger au cours de la période 1999-2003 (ESAM II, 2004). En 2013, la présence des femmes est de l’ordre de 17% parmi les Sénégalais ayant émigré vers l’étranger entre 2008 et 2012 (ANSD, 2014). Avant, les flux de migration internationale féminine étaient dominés par les étudiantes et les femmes parties rejoindre leurs conjoints déjà établis de façon durable. Il s’y est ajouté une émigration de femmes seules, actives et autonomes, à la recherche d’un meilleur statut économique et social. La présence croissante des femmes est l’une des caractéristiques montantes des dynamiques migratoires internationales actuelles.
Contribution de la diaspora au développement
Par ailleurs, les montants des transferts de la diaspora sénégalaise ont pris une ampleur considérable au cours des dernières années. Leur volume est passé de 233 millions USD en 2000 à 925 millions en 2006, puis à 1 614 millions en 2013, pour atteindre 2220 millions en 2017. Cela représente en moyenne à peu près 930 milliards de FCFA par an au cours des dix dernières années (2008-2017). La part de ces transferts dans le PIB du Sénégal est passée de 6% en 2001 à 8,6% en 2007 et à 13% en 2017.
Les pays de provenance des envois de fonds sont très divers. Mais on constate une prédominance de la France (647 millions USD en 2017) et de l’Italie (425 millions USD), suivis de l’Espagne (302 millions USD). En Afrique, la Gambie (264 millions USD), la Mauritanie (130) et le Gabon (116) constituent les principaux pays émetteurs. Les Etats-Unis contribuent à hauteur de 85 millions USD de ces transferts.
Toutefois, l’apport des Sénégalais de l’extérieur dans l’investissement économique est relativement faible. En effet, l’essentiel des transferts de fonds effectués par les émigrés sont destinés à la consommation des ménages d’origine. Le souci majeur renvoie à la question de savoir comment orienter une part importante de ces envois de fonds vers l’investissement économiquement productif.
Dans cette optique, plusieurs initiatives sont développées, à travers des projets et programmes de mobilisation des ressources financières et de savoir-faire des émigrés en vue de leur investissement dans les secteurs porteurs et générateurs d’emplois. Ces actions restent encore limitées. Mais de telles initiatives permettent d’ouvrir de nouvelles approches, au niveau local, dans les zones d’émigration, mais aussi au niveau central de la prise de décision politique.
Emploi des jeunes
L’emploi des jeunes demeure une préoccupation majeure. La population sénégalaise est caractérisée par sa jeunesse : l’âge médian est de 18 ans en 2013, ce ratio étant de 17 ans chez les hommes contre 19 ans chez les femmes. L’âge moyen se situe à 22,7 ans. Par ailleurs, les moins de 25 ans représentent 62% de la population totale selon les données du dernier recensement de 2013.
Par rapport à la population potentiellement active, la capacité d’absorption des demandes d’emploi par le secteur public est marginale. En 2013, la population en âge de travailler est évaluée à 7.827.009 pour 5.018 emplois créés dans la fonction publique au cours de la même année. Le secteur privé contribue aussi faiblement à l’absorption de la quantité importante de la main-d’œuvre disponible sur le marché du travail. Ce secteur n’a généré que 31.460 emplois au 31 décembre 2017 selon les données de la Direction des Statistiques du Travail et des Etudes (DSTE).
Cette faiblesse de l’offre d’emplois formels contribue fortement à faire du secteur informel le principal secteur d’insertion économique de la population en âge de travailler. Mais la dynamique de ce secteur s’appuie essentiellement sur l’utilisation de travailleurs très peu ou pas rémunérés, ce qui sous-entend l’existence d’un important sous-emploi.
Les difficultés de la jeunesse sénégalaise renvoient au problème fondamental de la formation et de l’emploi. Dans le même temps, la structure par âge ouvre une fenêtre d’opportunité, à travers la capture du dividende démographique, pour accélérer sa croissance économique.
Traite des personnes
Le Sénégal est à la fois un pays d’origine, de transit et de destination du trafic illicite de migrants et de la traite des personnes. Mais à l’état actuel, il est difficile de déterminer leur ampleur et incidence réelle. Il n’existe pas de système de données centralisées sur la traite des personnes et le trafic illicite de migrants au Sénégal. Les quelques données existantes sont parcellaires, les statistiques pratiquement inexistantes et la recherche encore embryonnaire.
Si l’on considère les données du dernier recensement de la population de 2013, on constate que les 10 premiers pays de destination des Sénégalais se répartissent entre l’Europe occidentale (France, Italie, Espagne), l’Afrique de l’Ouest (Mauritanie, Gambie, Côte d’Ivoire, Mali), l’Afrique Centrale (Gabon, Congo) et l’Afrique du Nord (Maroc).
Ces émigrés proviennent essentiellement de la région de Dakar (30%), de Matam (14%), de Saint-Louis (10%), de Diourbel (9%) et de Thiès (9%). Dans une moindre mesure, les régions de Tambacounda (7%), de Kolda (5%), de Louga (5%) et de Kaolack (3,5%) sont des foyers émetteurs, de même que les régions de Ziguinchor (3%), de Sédhiou (2,5%) et de Fatick (2,4%). Les ressortissants de Kaffrine et de Kédougou sont les plus faiblement représentés dans les effectifs d’émigrants récents avec respectivement 1,2% et 0,5%. Cette généralisation des régions de départ traduit une diffusion du comportement migratoire à l’intérieur de la société sénégalaise.
On assiste aussi à une diversification des profils migratoires et des catégories de migrants. Le phénomène migratoire concerne particulièrement les jeunes des quartiers péri-urbains populaires et du milieu rural. Les ressortissants des zones traditionnelles de pêche artisanale sont aussi de plus en plus impliqués. Le secteur
informel semble constituer un grand « réservoir » de potentiels candidats à l’émigration internationale. C’est dire qu’au Sénégal, le phénomène de l’émigration internationale s’est fortement généralisé et touche toutes les couches de la population active, en particulier les jeunes, en milieu rural comme en milieu urbain.
Migration irrégulière
Le phénomène de l’émigration irrégulière prend également de l’importance, même s’il est pratiquement impossible de fournir des chiffres exacts sur son ampleur. Les données sur le phénomène sont à la fois parcellaires et fournies de manière irrégulière.
Cette forme de migration constitue une préoccupation majeure, d’abord à cause des drames qu’elle occasionne le long des périples et routes migratoires dangereux, mais aussi et également sans l’angle de la problématique de l’insertion des jeunes sénégalais dans le marché du travail national.
Migration de retour
La migration de retour constitue une variable mal connue, du fait de l’absence de données adéquates. Globalement, il n’existe pas de système d’enregistrement centralisé des migrants de retour permettant de déterminer leur nombre exact et leur profil sociodémographique et économique, qui pourrait servir de base de données pour le suivi, l’accompagnement et la création de projet de réinsertion. A cet égard, les facteurs qui déterminent le retour, ainsi que les modalités du retour et la manière dont celui-ci est vécu par le migrant sont autant de pistes de réflexion à explorer pour une meilleure compréhension des flux de migration de retour, volontaires et involontaires.
Migration interne
Les migrants internes sont essentiellement polarisés par la région de Dakar (43,2% des effectifs), ce qui correspond à près de 820.000 migrants, soit le quart de la population dakaroise. L’importance des flux migratoires internes vers Dakar pose le problème fondamental de l’inégale répartition de la population sur le territoire national, avec comme conséquence, un déséquilibre démographique considérable entre les régions de l’intérieur et la capitale.
Les femmes et les enfants seraient les principaux concernés par le phénomène de la traite des personnes. Ces « groupes vulnérables » sont souvent soumis à l’exploitation par le travail ou par le sexe, et doivent faire l’objet de protection contre les réseaux criminels organisés sur les plans transnational et local. Découvrez tout le rapport à travers ce lien :https://www.ansd.sn/ressources/publications/Resume%20Executif%20-%20Profil%20Migratoire%20du%20Senegal.pdf